L’homme invisible #lachronique

L’homme invisible #lachronique

J’AI RENCONTRÉ L’HOMME INVISIBLE :

Une aventure tout à fait normale

Jeudi 5 heures #18/01/2024

 

Bonjour les yeux !

… et bienvenue chez moi, dans ce petit bout de ma tête qui parle !

 

 

Hier, au ski…

 

Quel rapport avec le ski, l’homme invisible ? Elle confondrait pas avec le yéti ? Ou le dahu peut-être…

Non, non, pas du tout. (Bien que ces deux poilus puissent avoir leur place ici.)

Hier, au ski, mes cuisses se rappelaient juste que leur dernière descente remontait à trois ans. (La neige était dure, dans les Pyrénées-Orientales, et les quadriceps ont un peu chauffé.) Petite souffrance physique passagère et personnelle, invisible aux yeux des autres.

Et puis de là, je me suis mise à penser aux souffrances psychiques, invisibles aussi aux yeux des autres, et parfois même aux yeux des principaux intéressés. Contrairement aux souffrances physiques, mais qui sont toujours invisibles aux yeux des autres.

 

 

Les douleurs invisibles

 

(Oui le ski, ça m’inspire, le grand air de la montagne et tout…)

Et puis je me demandais si un gars, un jour, avait fait une liste, à deux colonnes, avec à gauche « douleurs visibles » (jambe cassée, sinusite, plaie ouverte…), et à droite « douleurs invisibles » (trouble psy, névralgie faciale, déchirure musculaire…)

Peut-être qu’on se rendrait compte que la colonne de droite est sacrément plus longue que celle de gauche… c’est probable (si quelqu’un est volontaire pour vérifier ?)

Au-delà du tabou de la douleur, et du problème de sa reconnaissance par ceux qui sont censés la soigner (ça semble s’améliorer milieu-fin XXe…), reste le regard du non-douloureux sur le douloureux : il n’a aucune idée de ce que c’est, de ce que l’autre est en train de vivre.

La douleur invisible, « propre », intangible, impalpable, qui ne fait pas (encore) de bruit, une douleur à la limite de la crédibilité. Si elle fait du bruit (grimaces et/ou hurlements), ça dérange davantage (puisque ça fait moins « propre »), mais on a une chance de se faire entendre — mais bon, si les douloureux doivent toujours faire la gueule quand ils ont mal quelque part, pas sûr que ça augmente beaucoup leur cote de popularité… Et puis on a le droit d’être heureux même quand on souffre, heureusement ! Mais d’un coup, on nous croit plus (Ben non, il peut pas avoir mal, t’as vu comme il a bonne mine le Gégé ?)

Bref.

 

La souffrance, c’est comme les serviettes hygiéniques :

ça se vend mieux quand c’est invisible (et pas trop mouillé)

(« NANA® INVISIBLE, avec voile sensation sec », publicité de 1992, j’ai vérifié)

 

 

Invisible n’est pas inaudible

 

Nos douleurs invisibles le restent tant qu’on n’en parle pas. Encore faut-il oser en parler ; ça a l’air si facile de dire : « j’ai mal ». Ça l’est moins de le répéter une quatrième fois, après trois « oh mais ça va, hein, faut quand même pas exagérer » — les mots qui s’usent, là aussi…

Il y a des douleurs qu’on doit taire plus que d’autres. C’est comme les maladies, on colle parfois une certaine noblesse sur d’improbables sujets. Les douleurs psychiques, ces mal-aimées. Ressentir un mal-être quand on est en bonne santé physique, ça ferait presque vulgaire (alors si, en plus, on a « tout ce qu’il faut » à côté…)

 

L’art de se plaindre

 

C’est le titre d’un livre (très concret, je vous le conseille) : « l’art de se plaindre et de se faire entendre », de Guy Winch (éd. Payot).

Se plaindre, un art ? Certainement, hélas. Oser dire, oser montrer ce qui ne se voit, ne s’entend pas, devrait être naturel et spontané, pour être entendu et écouté. C’est presque un comble que ce soit au douloureux d’adapter sa communication à l’autre, mais on en est pourtant bien là. Images de personnages sociaux jeunes, sains et productifs.

Les réalités humaine et biologique sont un peu différentes… On le sait, on le sent, on l’entend tous les jours, notre réalité : celle qui ne se voit pas, à l’intérieur, notre humanité, notre biologie. Notre homme invisible à nous, dedans.

Mais on veut rêver quand même, qu’on est jeune, sain et productif. On rêve d’un ailleurs, à l’extérieur de nous. C’est à ce moment, parfois, que l’intérieur commence à nous rappeler, « hé ho ! Reviens ! Je suis là ! » (une bonne entorse, un petit lumbago…)

Mais une chose est sûre : on va passer toute notre vie avec notre homme invisible, alors il vaut mieux bien le voir, et bien s’entendre avec.

 

 

Audrey, de retour du psy, le 17 janvier 2024

 

 

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